Le commissaire Bordelli, de Marco Vichi

Lorsque je découvre en librairie ce livre de poche à la couverture qui représente de façon stylisée les monuments de Florence, je suis tout de suite attirée : un titre et un auteur au nom italien, une nouvelle série de polars transalpins ? La quatrième de couverture me promet une enquête qui se déroule dans les années soixante à Florence et un commissaire qui roule en coccinelle et est souvent poursuivi par des souvenirs de la Résistance. Voilà qui est intéressant, d’autant qu’Andrea Camilleri est convaincant :

« Livre après livre, Vichi nous dévoile les côtés sombres et les secrets de Florence. Mais sa meilleure création, selon moi, reste le personnage de Bordelli, un antihéros désabusé qu’il est difficile d’oublier ».

 

le commissaire Bordelli

 

Et c’est bien vrai, je me souviendrai du commissaire Bordelli et j’attendrai avec impatience de lire la suite de ses enquêtes. Certes, Bordelli est sans aucun doute désabusé. A cinquante-trois ans, il en a déjà vu de toutes les couleurs ! Mais il adore son métier qui consiste avant tout à appliquer la loi et arrêter des assassins. Et il est prêt à fermer les yeux lorsque son sens de la justice l’exige : un petit cambrioleur qui vole quelques objets afin de les revendre pour pouvoir manger ne constitue pas une raison pour que Bordelli perde son temps. Il va même jusqu’à l’inviter à sa table ! Ce robin des bois moderne ne remporte donc pas les faveurs de son supérieur, Inzipone, qui lui reproche de trop souvent transiger avec la loi.

Dans ce premier épisode traduit en français, le commissaire Bordelli se trouve confronté à la mort mystérieuse d’une vieille dame retrouvée allongée sur son lit, dans sa magnifique villa sur les hauteurs de Florence. Elle semble avoir été victime d’une forte crise d’asthme, mais le commissaire Bordelli sent tout de suite que la scène est trop parfaite, ce que lui confirmera plus tard le vieux médecin légiste au nom qui ressemble à un message menaçant lancé à l’assassin, Diotivede (« Dieu te voit »).

Se fiant à son intuition, et grâce à l’aide d’un jeune inspecteur très perspicace, Piras, qui est le fils d’un sarde auquel Bordelli a sauvé la vie pendant la guerre, le commissaire mène rondement son enquête dans une ville écrasée de chaleur et désertée par des habitants partis se rafraîchir à la mer : pas de police scientifique, ni de haute technologie, -nous sommes en 1963 et c’est aussi ce qui fait le charme du roman-, mais des observations et des déductions qui mènent Bordelli à la solution.

Célibataire par la force des choses, le commissaire florentin donne tout à son travail et, s’il lui arrive de boire une ou deux bières pour oublier la chaleur de Florence, ou d’accepter un vermouth qu’il regrette aussitôt, il n’a rien des flics alcooliques qui sont les héros de nombreux polars actuels. Il possède néanmoins quelques failles et la principale remonte à la guerre, pendant laquelle il a traqué et tué de nombreux nazis. Bordelli se perd souvent dans ses souvenirs et se rappelle divers épisodes de sa participation à la Résistance, ce qui donne une tonalité bien particulière à l’univers de ce héros.

Ses souvenirs ne concernent pas seulement les heures noires de l’histoire italienne. Bordelli se remémore aussi des moments heureux de son enfance, comme lorsqu’il revoit les vacances à la mer en compagnie de ses tantes. Quant aux personnages secondaires, Marco Vichi leur apporte un soin particulier : ainsi, Rodrigo, le cousin de Bordelli, bouleversé par l’amour qu’il éprouve pour la première fois à cinquante et un ans ! Il y a également Botta, l’ancien repris de justice qui a appris la cuisine en prison et qui prépare les repas que Bordelli désire partager avec ses amis, et Rosa, une vieille prostituée au cœur d’or, amie de Bordelli.

Le dîner que Bordelli organise est un moment mémorable : outre le fait qu’il réunit des participants aussi dissemblables qu’un ancien prisonnier, un commissaire, un voleur, un vieux psychanalyste, un médecin légiste et un scientifique ami des rats, il est l’occasion pour chacun de raconter un épisode de sa vie ou une anecdote en apparence insignifiante…

Il ne me reste plus qu’à espérer la traduction rapide de la suite des enquêtes de Bordelli. Ce premier épisode a été publié en 2002 en Italie. Depuis, plusieurs épisodes sont sortis, nous laissant augurer des heures de plaisir…

Le commissaire Bordelli, Marco Vichi, traduit de l’italien par Nathalie Bauer, 10/18, n°5059, mars 2016.

 

Lu dans le cadre du challenge Il viaggio et du challenge polars et thrillers

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