Aventures/ Gli amori difficili, Italo Calvino

L’auteur

 

Né en 1923 à Cuba et mort en 1985 à Sienne, Italo Calvino est l’un des plus grands écrivains italiens du vingtième siècle. Il a écrit de nombreux romans, des fables, des nouvelles, ainsi que des essais et des scénarios pour le cinéma. Rattaché au réalisme italien, il était également membre de l’Oulipo.

 

Les nouvelles

 

Publié en 1970 en Italie sous le titre « Gli amori difficili » (Les amours difficiles), et en France en 2002 sous le titre « Aventures », ce recueil de nouvelles regroupe treize textes écrits entre 1949 et 1967 : treize nouvelles qui parlent de couples qui « ne se rencontrent pas ». Rencontres avortées ou sans lendemain, courts moments où homme et femme se croisent, autant de situations dans lesquelles, davantage que la difficulté de s’aimer, c’est l’impossible communication entre les êtres que l’auteur souligne.

Tout l’art de Calvino, et c’est en partie ce qui fait les classiques, est de réussir à être universel. Il nous raconte de vraies histoires, souvent très visuelles -certaines de ces nouvelles ont d’ailleurs été adaptées au cinéma-, et nous invite à réfléchir en nous parlant d’amour sans en avoir l’air, qu’il s’agisse de « l’aventure d’une baigneuse », qui n’ose plus revenir à la plage parce qu’elle a perdu son maillot en nageant, de « l’aventure d’une épouse » qui a passé la nuit dehors parce qu’elle avait perdu ses clés et se demande si ce simple fait peut être considéré comme un adultère, de « l’aventure de deux époux », qui s’aiment mais ne peuvent se voir que quelques minutes chaque jour, ou de « l’aventure d’un voyageur » pour lequel l’attente et la sensation de l’amour sont plus importantes que l’amour lui-même.

On souffre avec les protagonistes, comme le myope qui se rend compte qu’il ne peut en même temps voir ses amis et être reconnu tel qu’il était auparavant. On s’émerveille avec ce poète qui s’émeut devant la beauté du monde, mais ne peut traduire en mots sa propre émotion et reste donc silencieux. Les héros sont plutôt des anti-héros, mais quelques-unes des protagonistes féminines sont solaires et illuminent des textes où l’auteur fait la part belle à la lumière. Quoi qu’il en soit, tous les personnages sont touchants, dans leur difficulté d’aimer et de communiquer et partant, de vivre.

Hommes et femmes ne se rencontrent pas parce qu’ils ne parlent pas le même langage, parce qu’ils ne parviennent pas à exprimer leurs sentiments et leurs désirs. C’est donc à un voyage dans l’incommunicabilité que nous convie Calvino, nous conduisant parfois dans des situations absurdes et inextricables.

« Aventures » est un recueil de nouvelles passionnant qui nous ramène à des questions fondamentales et universelles, au moyen d’une écriture recherchée et classique et d’un ton très souvent ironique. Il nous offre également un panorama de la société italienne d’après-guerre. Les italianistes apprécieront la variété de vocabulaire en lisant la version italienne « Gli amori difficili ». Les cinéphiles pourront déguster l’adaptation cinématographique très fidèle au texte de « l’aventure d’un soldat » et celle, beaucoup plus libre, de « l’aventure de deux époux » dont vous trouverez les liens ci-dessous.

Le recueil est complété par une seconde partie intitulée « La vie difficile » deux courts romans dont « La fourmi argentine » « Le nuage de smog » dont je vous parlerai bientôt.

 

Aventures, Italo Calvino, traduit de l’italien par Maurice Javion et Jean-Paul Manganaro, Seuil, 2002, 289 p.

Gli amori difficili, Italo Calvino, Mondadori, collana Oscar Moderni, 2017, 233 p.

 

Voici le court métrage inspiré de « L’aventure d’un soldat », avec Nino Manfredi:

https://www.youtube.com/watch?v=WciNih7vRkw

 

Et « Boccaccio 70 », film de 1962 en quatre parties dont la première, intitulée « Renzo e Luciana » (cf « I promessi sposi ») est dirigée par Mario Monicelli :

https://www.youtube.com/watch?v=fKwseb-bfbA

 

L’été du commissaire Ricciardi / Il posto di ognuno, l’estate del commissario Ricciardi, Maurizio de Giovanni.

L’auteur

 

Né en 1958 à Naples, Maurizio de Giovanni, d’abord banquier, est devenu l’auteur de nombreux romans policiers. Ses deux séries les plus connues se déroulent à Naples : celle du Commissaire Ricciardi au début des années trente, et celle du commissaire Lojacono, à l’époque actuelle.

 

Le roman

 

Le roman de Maurizio De Giovanni a plus que rempli sa mission : me transporter à Naples, loin de notre quotidien un peu angoissant. Pourtant, la situation n’est pas non plus des meilleures en ce début des années trente dans la grande ville parthénopéenne : la chaleur est étouffante, le peuple vaque difficilement à ses occupations pour pouvoir manger, le fascisme s’installe peu à peu.

Le commissaire Ricciardi voit toujours des « choses » : son don malheureux lui impose en effet de voir les morts assassinés ou décédés d’une mort violente, au moment de leur passage de vie à trépas. Et c’est le cas de la Duchesse de Camprino que l’on vient de retrouver dans son palais napolitain, la tête percée d’une balle silencieuse mais fatale. Personne n’a rien entendu, d’une part parce qu’un coussin maintenu contre le visage de la victime a atténué le bruit de la détonation, mais aussi parce qu’une grande fête populaire battait son plein dans le quartier.

L’enquête s’oriente aussitôt vers Capece, un journaliste connu qui était l’amant de la Duchesse : celle-ci vivait en effet de façon indépendante, sans se préoccuper de son époux, le vieux Duc de Camprino, malade et alité depuis longtemps. Ricciardi se met aussitôt au travail, aidé du brigadier Maione qui, fâché contre sa femme, entame un régime, se privant ainsi des plats délicieux de celle-ci.

Ricciardi a quant à lui la surprise de rencontrer la très belle Livia Lucani qui lui annonce qu’elle vient passer de longues vacances à Naples, dans le seul but de faire plus ample connaissance avec lui. Mais le commissaire reste attiré par la douce Enrica Colombo qu’il continue à contempler chaque soir par la fenêtre. Jusqu’à ce qu’il se rende compte que la famille Colombo reçoit un jeune homme qui se comporte comme un prétendant…

Tome après tome -il s’agit ici du troisième-, la série des enquêtes du commissaire Ricciardi est la certitude d’une lecture agréable et prenante et d’un voyage dépaysant à Naples dans une période historique troublée. Outre l’enquête en elle-même, les interrogations du commissaire Ricciardi sur sa vie sentimentale prennent ici de l’importance : il ira jusqu’à remettre en question la décision qu’il avait prise de ne pas imposer à une femme la malédiction dont il est l’objet. Il y a enfin l’aspect historique avec la montée du fascisme que l’on sent plus présent que dans les tomes précédents. La recette de Maurizio de Giovanni fait donc appel à de multiples ingrédients, une intrigue policière, des éléments historiques et sociaux, un peu de fantastique, de l’humour, des sentiments, le tout servi par un style fluide et une construction dynamique. Mes prochains achats, sans aucun doute, seront « L’automne du commissaire Ricciardi » et « L’hiver du commissaire Ricciardi ». C’est donc par une excellente lecture que je début le mois italien !

 

L’été du commissaire Ricciardi, Maurizio De Giovanni, traduit de l’italien par Odile Rousseau, Rivages/Noir, 2014, 405 p.   

 Il posto di ognuno, l’estate del commissario Ricciardi, Maurizio de Giovanni, Einaudi, 2013, 325 pp.

 

Turin

Ville au passé industriel, Turin a longtemps souffert d’une image peu attractive, mais c’était oublier la richesse artistique et culturelle de celle qui a été capitale des ducs de Savoie de 1563 à 1792, puis première capitale de l’Italie unifiée -avant Rome-, de 1861 à 1865.

Aujourd’hui, outre les musées très variés qu’elle propose, c’est aussi une ville pour les flâneurs : ses kilomètres d’arcades protègent le promeneur du soleil estival et des pluies de l’automne, ses larges places offrent des pauses bienvenues en terrasse,  ses façades aux riches ornements et ses magnifiques cours intérieures suscitent toutes les curiosités. Une vraie invitation à la promenade…

Le coeur du centre historique, avec le Palazzo Madama, sur la Piazza Castello

et le Palazzo Reale, qui abritent plusieurs musées.

 

Tiens, c’est une église, ça ?

Oui, San Lorenzo, avec son espace octogonal étonnant et splendide !

Partons vers le fleuve, par la Via Po, dont les arcades abritent libraires et bouquinistes.

 

Un peu plus loin, sur la gauche, la Mole, magnifique édifice emblématique de Turin, qui abrite le musée du cinéma.

Les terrasses de la piazza Vittorio Veneto ne sont pas encore dressées, allons jusqu’au Pô,

et suivons ses berges reposantes et ombragées,

jusqu’au Parc du Valentino

où les oiseaux et les écureuils s’en donnent à coeur joie.

Après cette pause relaxante, retour en ville. Le palazzo Carignano et sa façade un peu austère,

une très jolie galerie, qui n’a rien à envier à celles de Milan et de Naples, si ce n’est la taille.

 

 

Et puis, toutes sortes de façades

 

 

On s’arrête quelques instants à l’ombre ?

Une pause prolongée, c’est l’heure de l’Apericena.

Et la nuit tombe sur la Piazza San Carlo, sans doute le plus bel endroit de la ville, où le rêveur resterait des heures…