Eva dort, de Francesca Melandri

L’auteur

 

Francesca Melandri est née à Rome en 1964. Elle est scénariste et réalise des documentaires.  Elle publie son premier roman, « Eva dorme/Eva dort » en 2010 et reçoit pour celui-ci plusieurs prix littéraires.  « Più alto del mare/Plus haut que la mer » est son second roman. Il a, entre autres,  obtenu le Prix Stresa en 2012 et a été finaliste du prix en 2012.

 

Le roman

 

 

Eva dort Melandri

 

Eva est de retour en Italie après un séjour à l’étranger. Elle retrouve les pentes encore enneigées de sa vallée ample et lumineuse du « Tyrol du sud », comme disent ses compatriotes de langue allemande, du « Haut-Adige » comme les italiens appellent cette terre du nord située aux confins de l’Autriche. Vito appelle Eva. Mourant, il veut la revoir une dernière fois. Mais Eva ne trouve pas de billet d’avion pour partir aussitôt en Calabre. Peu importe, elle prendra le train jusqu’à la pointe de la botte, plus de vingt-quatre heures de trajet, mais il faut arriver à temps ! Un long voyage qui est l’occasion pour Eva d’évoquer l’histoire de sa famille, et plus particulièrement celle de sa mère, Gerda, jeune fille séduite trop tôt par un fils de famille qui s’est tout de suite dérobé.

C’est au lendemain de la première guerre mondiale que les puissances victorieuses décidèrent, pour punir l’Autriche, de lui retirer le Tyrol du sud et d’attribuer ce territoire de culture germanique à la grande voisine du sud, l’Italie. Personne n’avait rien demandé, pas même l’Italie. Hermann, le grand-père d’Eva, se retrouve en pleine tourmente, obligé d’utiliser une langue qu’il ne connaît pas. Les lois fascistes de Mussolini exigent en effet l’usage exclusif de l’Italien en public, puis rapidement, tranchent pour une solution encore plus radicale pour romaniser cette terre trop germanique. Les Tyroliens du sud, germanophones, n’ont qu’à quitter leur terre pour rejoindre l’Autriche, sous peine d’italianisation forcée : des italiens les remplaceront.

C’est ainsi qu’Hermann choisit « l’Option » qui lui est proposée : entre exil et assimilation forcée, il décide de partir parce qu’il ne peut vivre sur une terre italienne. Le contraire serait une trahison, comme le clament les tracts nazis alors distribués dans la région et par lesquels il se laisse séduire. Après la guerre, Hermann est de retour et vit avec sa femme et ses enfants des moments très difficiles. Il doit se faire une place, s’intégrer, sur sa terre natale, là où il n’est plus chez lui ! Jusqu’au jour où il accepte de placer sa fille Gerda dans un hôtel, en tant qu’aide-cuisinière, un métier surnommé sans équivoque « matratzen » c’est-à-dire « matelas » ! Une chose que tout père devrait refuser. Mais Hermann est de ceux qui n’ont honte de rien, puisque quelques temps après, il n’hésite pas à fermer sa porte à Gerda, future fille mère. Courageuse, Gerda décide de garder son enfant et trouve une solution, tout en continuant à travailler durement.

Eva raconte la jeunesse de sa mère, les difficultés économiques, le contexte politique, les actes terroristes pratiqués par certains Tyroliens germanophones vis-à-vis des forces de l’ordre italiennes, en vue d’obtenir reconnaissance et autonomie. Et puis Vito, arrivé dans leur vie à toutes les deux, et reparti, laissant Eva orpheline une deuxième fois.

 

Eva dorme Francesca Melandri

 

Le roman de Francesca Melandri entrecroise l’histoire et la géographie italiennes, dans un périple qui mène Eva au cœur des années soixante et soixante-dix jusqu’à nos jours, et du nord au sud de l’Italie, à la recherche de ce père italien, un père qui aurait été parfait pour cette fillette allemande qui détestait répondre à la question qu’on lui posait si souvent : te sens-tu plus allemande ou plus italienne ?

« Eva dort » est un très beau roman qui nous fait découvrir un épisode douloureux de l’Histoire italienne, à travers l’histoire d’une jeune femme qui cherche son identité de fille, en évoquant l’identité perdue de ses ancêtres. Un premier roman très réussi, qui a obtenu en France le Prix des lecteurs 2013, et une auteure talentueuse en passe de devenir une valeur sûre de la littérature italienne contemporaine : Francesca Melandri, dont le second roman « Plus haut que la mer », subtil et abouti, connaît actuellement un vrai succès.

 

Eva dort, Francesca Melandri, traduit de l’italien par Danièle Valin, Folio n° 5676 , Paris, 2013, 464p.

Eva dorme, Francesca Melandri, Oscar Mondadori, collana Oscar contemporanea, Aprile 2011, 350 p.

 

Livre lu dans le cadre du challenge Il viaggio chez Eimelle.

challenge italie

7 réflexions sur “Eva dort, de Francesca Melandri

    • Le roman est en effet très bien construit. Il pourrait être facilement transposé au cinéma. Francesca Melandri était scénariste avant d’écrire ce premier roman… C’est en tout cas une auteure à suivre, à mon avis !

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